« Vous, les huissiers de justice, vous allez avoir moins de travail à partir du 1er novembre ! »
C’est une phrase que l’on entend souvent à l’approche de la trêve hivernale. Et c’est vrai… en partie seulement.
Car si cette période suspend effectivement la plupart des expulsions dans les logements à usage d’habitation, de nombreuses exceptions subsistent, notamment pour les locaux commerciaux, professionnels ou occupés sans droit ni titre (squats).
La trêve hivernale 2025-2026 débute le samedi 1er novembre 2025 et prendra fin le 31 mars 2026. Elle protège les occupants de logements contre les expulsions pendant l’hiver, mais elle ne concerne ni tous les biens, ni toutes les situations.
Cet article fait le point sur ce que dit la loi, les cas exclus du dispositif et les bons réflexes à adopter pour les propriétaires bailleurs.
1. Le cadre légal de la trêve hivernale
1.1 Définition et période
L’article L412-6 du Code des procédures civiles d’exécution dispose qu’« il est sursis à toute mesure d’expulsion non exécutée à la date du 1er novembre de chaque année jusqu’au 31 mars de l’année suivante », sauf exceptions prévues par la loi.
Autrement dit, aucune expulsion effective ne peut avoir lieu pendant cette période pour les logements d’habitation, sauf cas particuliers.
1.2 Objectif
Cette mesure vise à éviter les expulsions pendant les mois les plus froids.
Elle ne bloque pas les procédures judiciaires : un propriétaire peut continuer à saisir le juge, obtenir un jugement d’expulsion, mais l’exécution forcée (avec intervention du commissaire de justice) ne pourra intervenir qu’à partir du 1er avril.
2. Les exceptions prévues par la loi
Même pour les logements d’habitation, la trêve hivernale ne s’applique pas systématiquement.
L’expulsion reste possible pendant la période dans les cas suivants :
- Re logement adéquat : le locataire bénéficie d’un logement correspondant à ses besoins (article L412-6).
- Logement dangereux ou insalubre : un arrêté de péril ou d’insalubrité impose l’évacuation.
- Violences conjugales : le juge aux affaires familiales peut ordonner l’expulsion d’un conjoint violent, même durant la trêve.
- Occupation sans droit ni titre (squat) : la trêve hivernale ne s’applique pas aux squatteurs, y compris s’ils occupent une résidence principale, secondaire ou un local vide.
3. Locaux non à usage d’habitation : la trêve hivernale ne s’applique pas
La trêve hivernale vise exclusivement les locaux à usage d’habitation principale.
Les locaux commerciaux, entrepôts, garages, bureaux ou locaux professionnels ne sont pas concernés.
3.1 Conséquence pour le bailleur
Un propriétaire peut donc, pendant la trêve hivernale :
- Engager une procédure d’expulsion,
- Obtenir et faire exécuter une décision de justice,
- Faire intervenir un commissaire de justice sans attendre le 31 mars.
En pratique, les décisions de justice relatives à des baux commerciaux ou professionnels continuent d’être exécutées tout au long de l’hiver.
3.2 Exemple concret
Un propriétaire lyonnais loue un local commercial à une société en difficulté financière.
Malgré la trêve hivernale, il peut faire constater la résiliation du bail commercial et solliciter l’expulsion du locataire sans attendre le printemps.
La trêve hivernale ne bloque pas les procédures concernant ce type de bien.
4. Squats et occupations sans droit ni titre : une exclusion totale du dispositif
Depuis la loi du 27 juillet 2023, dite « loi anti-squat », la règle est sans ambiguïté :
Les occupants sans droit ni titre ne bénéficient d’aucune protection liée à la trêve hivernale, quelle que soit la nature du local occupé.
4.1 Les recours possibles
- Procédure judiciaire devant le tribunal judiciaire pour obtenir une ordonnance d’expulsion.
- Procédure administrative auprès du préfet, qui peut ordonner l’évacuation d’urgence dans certaines situations.
4.2 Exemples
- Un terrain ou entrepôt squatté : expulsion possible toute l’année.
- Un appartement ou une maison secondaire occupée illégalement : la trêve hivernale ne protège pas les occupants.
- Un local commercial transformé en squat : expulsion possible sans suspension saisonnière.
La loi vise à protéger le droit de propriété et à éviter que des occupants irréguliers ne profitent de la trêve pour se maintenir dans les lieux.
5. Synthèse des cas concernés ou exclus
| Type de bien ou situation | Trêve hivernale applicable ? | Expulsion possible entre novembre et mars ? |
| Logement à usage d’habitation principale | ✅ Oui (sauf exceptions) | 🚫 Non, sauf relogement, péril ou violences |
| Logement insalubre / arrêté de péril | ❌ Non | ✅ Oui |
| Conjoint violent expulsé du domicile | ❌ Non | ✅ Oui |
| Local commercial / professionnel / bureaux | ❌ Non | ✅ Oui |
| Garage, entrepôt, terrain | ❌ Non | ✅ Oui |
| Squat (occupation sans droit ni titre) | ❌ Non | ✅ Oui |
| Résidence secondaire occupée illégalement | ❌ Non | ✅ Oui |
6. Conseils pratiques pour les propriétaires bailleurs
- Anticiper la trêve : engager les procédures avant le 1er novembre permet d’obtenir un jugement exécutoire pour le printemps.
- Sécuriser les biens vacants : fermer, signaler, visiter régulièrement pour éviter les occupations illicites.
- Respecter la procédure : seule une expulsion menée par un commissaire de justice est légale.
- Conserver les preuves : loyers impayés, commandements de payer, constats, correspondances…
- Favoriser le dialogue : un plan d’apurement ou un accord amiable peut éviter une situation bloquée à la fin de la trêve.
La trêve hivernale 2025-2026 suspend la majorité des expulsions dans les logements d’habitation, mais elle ne concerne pas :
- les locaux commerciaux ou professionnels,
- les terrains, garages ou entrepôts,
- les occupations sans droit ni titre.
Pour les propriétaires bailleurs, il est donc essentiel de bien distinguer la nature du bien et la situation juridique de l’occupant afin d’agir dans le cadre de la loi tout en protégeant leurs droits.
Votre étude de commissaires de justice vous aide à y voir clair et à agir, même pendant la trêve hivernale.
❓ FAQ – Questions fréquentes sur la trêve hivernale 2025-2026
1. La trêve hivernale s’applique-t-elle aux squatteurs ?
Non. Les personnes occupant un bien sans droit ni titre ne sont pas protégées par la trêve hivernale, même si le bien constitue leur lieu d’habitation principal.
2. Peut-on expulser un locataire d’un local commercial pendant la trêve hivernale ?
Oui. La trêve hivernale ne concerne que les logements d’habitation. Les locaux commerciaux, professionnels ou à usage mixte ne sont pas protégés.
3. Que risque un propriétaire qui expulse sans respecter la trêve hivernale ?
Une expulsion menée en violation de la trêve peut être qualifiée de voie de fait et engager la responsabilité pénale et civile du propriétaire. Il est impératif de passer par un commissaire de justice.
4. Peut-on commencer une procédure d’expulsion pendant la trêve hivernale ?
Oui. Le propriétaire peut introduire une action en justice pendant la trêve. Seule l’exécution forcée de l’expulsion (intervention sur place) est suspendue jusqu’au 31 mars.
5. Que faire si mon local vide est squatté pendant l’hiver ?
Déposez plainte immédiatement et saisissez le préfet ou le juge pour demander une évacuation. La trêve hivernale ne bloque pas la procédure dans ce cas.
